Le ministre des Pêches et des Océans, Dominic LeBlanc, reconnaît qu’il est contradictoire de fermer une zone de protection marine à la pêche tout en y permettant les activités pétrolières. Il dit avoir lui-même sursauté quand il a vu cette proposition pour le projet de zone de protection marine du chenal laurentien, au sud-ouest de Terre-Neuve, à l’extérieur du golfe du Saint-Laurent.
Monsieur LeBlanc a été questionné à ce sujet le 28 juin, à l’occasion d’une conférence de presse au Yukon, où était réuni le Conseil canadien des ministres des pêches et de l’aquaculture. Les scientifiques du ministère sont d’avis que, selon la zone à protéger, certaines activités pétrolières ou de pêche peuvent être autorisées, souligne le ministre. «J’ai eu un peu la même réaction que j’ai vue de plusieurs personnes au cours des dernières semaines, dit-il. Comment ça se fait que si on a une zone de protection marine on peut entreprendre ce genre de travaux là? Mais moi, j’ai décidé de laisser comme tel l’avis scientifique, pour commentaires publics, précisément parce que ce n’est qu’une ébauche d’une proposition.»
Ainsi, selon Dominic LeBLanc, l’ébauche soumise à une consultation en ligne de 30 jours, cet été, sera modifiée en bout de course. «Nous allons être sensibles aux commentaires et aux suggestions que nous allons recevoir. Et, quand la deuxième version sortira, ça risque d’être différent de ce qui a été proposé au début, affirme le ministre. Et, c’était le cas dans d’autres zones de protection marine, dans d’autres régions du pays aussi.»
La consultation publique sur le projet de zone de protection marine du chenal laurentien a pris fin le 3 août. Le ministère a reçu une trentaine de milliers de commentaires écrits. Un rapport sera publié d’ici le mois de décembre.
AIRE MARINE PROTÉGÉE
Et pendant ce temps, où en sont rendues les discussions fédérales-provinciales pour la création d’une aire marine protégée aux Îles-de-la-Madeleine? Elles cheminent sans obstacle, assure le ministère québécois du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte aux changements climatiques, qui admet néanmoins qu’elles s’avèrent plus longues que prévu.
De son côté, Parcs Canada, qui a initié le projet en 2004, dit travailler activement à établir les conditions favorables à l’instauration d’une aire marine aux Îles, et ce, tant en partenariat avec le gouvernement Couillard qu’avec d’autres ministères fédéraux. «Je dois dire que pour nous, le Québec est un partenaire de premier rang, souligne pour sa part le ministre des Pêches et des Océans. Le Québec a toujours été très conscient, et l’actuel gouvernement est très conscient, du besoin de protection environnementale.»
Cela dit, Dominic LeBLanc précise que plusieurs scénarios sont sur la table pour respecter ses engagements internationaux visant la protection de 10 % des milieux marins d’ici 2020. «Pour le moment, la question de la zone autour des Îles-de-la-Madeleine n’est pas arrêtée à une décision finale, dit-il. C’est une discussion que nous allons avoir au cours des prochains mois avec l’industrie de la pêche, avec le gouvernement du Québec. Mais, pour le moment, nous n’avons pas arrêté une option; il y a bien d’autres options dans le golfe du Saint-Laurent que nous allons considérer en même temps.»
D’ailleurs, selon le professeur Jean-Claude Brêthes, titulaire de la chaire UNESCO en analyse intégrée des systèmes marins de l’Université du Québec à Rimouski, le projet d’aire marine protégée de l’archipel madelinot est plus complexe à mettre en place à cause de l’intensité de ses activités de pêche et de chasse au loup-marin. À ce propos, le directeur de l’Association des chasseurs de phoque intra-Québec, Gil Thériault, va plus loin. Il dit que jamais les pêcheurs madelinots n’accepteront le projet d’aire marine protégée, pas plus que celui de réserve mondiale de la biosphère piloté par la Municipalité des Îles, tant qu’ils n’auront pas accès à la réserve écologique de l’île Brion pour chasser le phoque gris.
ENVIRONNEMENT – page 25 – Volume 30,4 – Septembre-Octobre-Novembre 2017