L’entreprise de transformation Fruits de Mer Madeleine de L’Étang-du-Nord et trois de ses pêcheurs copropriétaires sont désormais actionnaires de Madelipêche. Cette dernière détient une part historique de 25 % du contingent global de sébaste du Golfe du Saint-Laurent, équivalant à 80 % de l’accès québécois à la ressource. Son gestionnaire, Paul Boudreau, explique que le nouveau partenariat lui procure une capacité de capture et de transformation.
«Ce ne serait pas vraiment logique, avec des usines qui sont inopérantes une grande partie de l’année, de construire une autre usine pour transformer le sébaste, mentionne M. Boudreau. Ça fait que c’est plus de la collaboration dans l’industrie, que Madelipêche entrevoit.»
Les trois capitaines nouvellement actionnaires de Madelipêche sont Francis Poirier, Bruno-Pierre Bourque et Denis Éloquin. Quant au président de Fruits de Mer Madeleine, Claude Poirier, il mise sur la reprise de la pêche au sébaste pour stabiliser ses 160 emplois en usine. «Avec le sébaste qui, on l’espère, va arriver à ce moment-là, ça va consolider vraiment le travail, ici en usine, pour pratiquement plusieurs mois, si ce n’est pas à l’année», fait-il valoir.
La CTMA, Jacques Chevarie et l’épouse de Guy Langford ont, quant à eux, cédé leurs parts dans Madelipêche. Ils étaient membres du fameux Groupe des 12 qui avaient acheté l’entreprise au moment de sa privatisation, par le gouvernement Bourassa, en 1987. De ce groupe initial, il ne reste plus que Paul Delaney, Robert Thériault, Georges Cormier et Marc Leblanc. Quant à l’entreprise Fruits de Mer Madeleine de L’Étang-du-Nord fondée en 1991, elle compte huit actionnaires, tous des pêcheurs traditionnels de crabe des neiges.
INVESTISSEMENT DE 5 MILLIONS $
Cette dernière planifie d’ailleurs un investissement de cinq millions de dollars pour agrandir ses installations et les conformer aux normes internationales de sécurité alimentaire. Un appel d’offres sera bientôt lancé pour la réalisation des travaux, qui en augmenteront la superficie du tiers. Le président de Fruits de Mer Madeleine précise que le nouvel espace accueillera éventuellement une chaîne de traitement du sébaste. «Il comprendra aussi une chambre de refroidissement, parce que celle qu’on a présentement est rendue inadéquate, un hangar, et un entrepôt d’emballage», dit-il.
De plus, l’entreprise de transformation a déjà presque complété la première de trois étapes qui mèneront à la certification de l’Initiative mondiale de sécurité alimentaire (GFSI). Selon Claude Poirier, c’est l’Agence canadienne d’inspection des aliments qui en fait une exigence. «C’est un programme qu’on n’a pas le choix d’y adhérer, mais nous ne sommes pas sous obligation, actuellement, indique-t-il. On y va lentement, mais sûrement.»
ÉTUDE DE MARCHÉ
Pendant ce temps, l’Association québécoise de l’industrie de la pêche (AQIP) a retenu les services de la firme Raymond Chabot Grant Thornton, cet automne, pour faire une étude sur la demande du marché domestique pour le sébaste. Alloué dans le cadre d’un processus d’appel d’offres, le mandat de 35 000 $ est subventionné à 70 % par le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ). Paul Boudreau, qui est membre du Comité québécois sur le sébaste chapeauté par le MAPAQ, explique que l’étude vise à déterminer ce que veut le marché et à quel prix. «Il y a eu très peu de volume sur le marché, envoyé de la part des Canadiens (ces deux dernières décennies), dit-il. Et puis là, c’est de revoir le nouveau marché, ou l’avenir dans le marché; à savoir où il se situe, sur quels types de produits, pour être capables d’orienter les acquisitions d’équipements, et cetera.»
Le directeur général de l’AQIP, Jean-Paul Gagné, espère aussi que l’étude convaincra le MAPAQ de mettre sur pied un programme spécifique de soutien à l’industrie de la capture et de la transformation, pour la relance de la pêche commerciale au sébaste. Il dit faire confiance au nouveau ministre de la Coalition Avenir Québec (CAQ), André Lamontagne, à cet effet. «Je pense que oui, parce que c’est un homme d’affaires, souligne M. Gagné. Ça fait que si c’est un homme d’affaires, il va comprendre des choses. Parce que c’est rare un ministre des pêches qui vient des pêches, nécessairement, là; ce n’est pas à tous les jours que ça arrive. Moi, j’ai confiance qu’avec une personne qui était en affaires, on va pouvoir s’entendre, autant du côté des pêcheurs que des industriels, et de tout le monde.»
Les conclusions de l’étude de Raymond Chabot Grant Thornton sont attendues pour juillet 2019. L’AQIP lancera un autre appel d’offres en début d’année, pour la réalisation d’une deuxième analyse, portant cette fois sur la demande du marché international, pour les produits du sébaste.
TRANSFORMATION – page 38 – Volume 31,5 – Décembre 2018 – Janvier 2019