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Sans faire de promesses, Jonathan Wilkinson discute de dossiers jugés prioritaires par les Madelinots

À peine six mois après sa nomination, le ministre des Pêches et des Océans, Jonathan Wilkinson, a effectué une visite de près de 24 heures, aux Îles-de-la-Madeleine, à la mi-janvier. Accompagné de sa collègue du Revenu national et députée de la Gaspésie et des Îles, Diane Lebouthillier, il a eu des entretiens avec les représentants des industriels, des pêcheurs et des chasseurs de loups-marins, mais aussi avec le maire, Jonathan Lapierre, et son équipe de direction. 

Les discussions ont surtout porté sur les baleines noires, les phoques gris et la reprise de la pêche commerciale au sébaste. «C’est très important pour moi de rencontrer les pêcheurs et les entreprises qui travaillent dans l’industrie de la pêche, pour entendre de vive voix leurs idées et leurs préoccupations, de sorte à avoir cette information quand je discute avec mes fonctionnaires à Ottawa», explique M. Wilkinson, dans un français plus que correct.

OUVERT À L’INNOVATION      

Sur la question des baleines noires, le ministre fédéral des Pêches se montre ouvert à supporter des projets de gestion novateurs qui donneraient plus de souplesse aux pêcheurs, tout en protégeant les mammifères menacés de disparition. En entrevue, il a notamment été amené à commenter le projet pilote qui a cours chez les pêcheurs de homard de Grand Manan, au Nouveau-Brunswick, pour éviter les fermetures de zones pendant 15 jours, dès qu’un mammifère fait son apparition. Jonathan Wilkinson leur permet de couper les cordages de cages ou les bouées de surface, dès qu’une vigie signale la présence d’une baleine. «Les pêcheurs de Grand Manan ont proposé de faire quelque chose qui travaille mieux pour eux, et nous avons dit «Bon, on peut essayer», dit-il. Et nous sommes ouverts à des choses comme ça dans les autres régions.»

En réaction, le directeur général de Fruits de Mer Madeleine, Pierre Déraspe, qui est le porte-parole du dossier du crabe des neiges au sein du conseil d’administration de l’Association québécoise de l’industrie de la pêche, se déclare très satisfait de sa rencontre avec le ministre. «Il est «sharp», commente-t-il; il est connaissant. C’est un ministre bien informé, qui a une bonne écoute, et qui connaît ses dossiers. Tout comme Mme Lebouthillier, d’ailleurs. J’ai bien hâte de voir les décisions concrètes quand le crabe va commencer, et si les bottines vont suivre les babines!»

APPROCHE ÉCOSYSTÉMIQUE

Dans le dossier du phoque gris, le ministre des Pêches et des Océans qualifie de très intéressantes les visées de transformation de Total Océan, pour la production d’une huile riche en Oméga-3. De telles initiatives commerciales rendent plus faciles, les décisions sur la chasse, assure-t-il. Le président de l’Association des chasseurs de phoques intra-Québec (ACPIQ), Jonathan Vigneau, souhaiterait à ce propos qu’on s’entende sur un seuil socialement acceptable pour la population de phoques gris, qui pousse la morue du sud du golfe vers l’extinction.

«C’est ce qu’on a toujours voulu, souligne-t-il. On a toujours dit qu’après un certain nombre X, ça devient de l’envahissement, puis une surabondance. C’est sûr que s’il peut nous arriver avec un chiffre raisonnable, qu’on serait vraiment contents.»

Jonathan Wilkinson reconnaît d’ailleurs qu’il serait bien avisé de modifier son approche de gestion par précaution par une approche écosystémique, qui tiendrait compte de l’impact des phoques gris sur l’ensemble de l’écosystème. «Je crois que nous devons tout le temps penser aux impacts sur l’écosystème, affirme le ministre. C’est très important, vous savez. Quelques fois on doit prendre les décisions difficiles pour assurer la biodiversité. Nous avons fait ça par le passé, comme avec les mesures des baleines noires. Nous devons être prêts à faire cela.»

De plus, sa collègue Diane Lebouthillier indique qu’on pourra puiser dans le nouveau Fonds des pêches du Québec pour soutenir la chasse aux phoques gris. «Parce que le Fonds des pêches, on veut que ça serve aussi à d’autres espèces; comment est-ce qu’on peut donner une valeur ajoutée à d’autres espèces qu’on ne pêche pas ou qu’on ne chasse pas actuellement», fait valoir la députée et ministre de la région.

PARTS HISTORIQUES

Jonathan Wilkinson précise aussi que le Fonds des pêches du Québec pourra également contribuer aux projets d’infrastructures, tel que l’agrandissement de l’usine Fruits de Mer Madeleine, à l’Étang-du-Nord, en prévision de la reprise de la pêche commerciale du sébaste. Quant à la protection des parts historiques de poisson rouge que réclament les Madelinots, le ministre admet qu’il s’agit d’un enjeu important. Il dit toutefois qu’il faudra attendre l’avis des sciences sur l’état de la ressource au moment de la reprise, prévue pour 2020, avant qu’il ne se prononce.

À ce sujet, le président du Regroupement des pêcheurs semi-hauturiers des Îles-de-la-Madeleine, Jocelyn Thériault, n’est pas surpris. «Comme de raison, on ne s’attendait pas à des annonces. Le but premier c’était de faire comprendre au ministre l’importance des quotas de sébaste aux Îles-de-la-Madeleine, puis je pense que l’écoute était là et qu’il a compris nos revendications», expose-t-il

Cela dit, M. Thériault, souhaite également que le ministre Wilkinson déploie autant d’énergie à protéger la morue du sud du golfe, qu’il le fait déjà pour les baleines noires. «La morue, tout le long des côtes de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine, ça créait de l’emploi et ça faisait vivre des communautés entières, insiste-t-il. Alors oui, les baleines noires, c’est beau de les sauver, mais ça ne rapporte rien à personne, à part que de sauver l’espèce. Puis, on parle de sauver l’espèce; c’est justement ce qu’on demande pour la morue!»

À ce propos, le ministre dit prendre bonne note du plan de réduction du troupeau de phoques gris, que lui a remis l’ACPIQ. «J’ai dit que j’allais l’étudier et en parler avec mes fonctionnaires, précise Jonathan Wilkinson. Je crois aussi que nous devons avoir une conversation dans laquelle tous les Canadiens peuvent discuter. Mais, si la réponse c’est «Correct», nous devons faire quelque chose. Et, si la science dit «Quelque chose est clair», nous devons avoir un plan; nous devons avoir une solution.»

GESTION DES PÊCHES – page 21 – Volume 32,1 Février-Mars 2019

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Hélène Fauteux
Hélène Fauteux est diplômée en communications et journalisme de l'Université Concordia. Établie aux Îles-de-la-Madeleine depuis 1986, elle a développé une solide expertise en matière de pêche et de mariculture.
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