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Pêche au crabe de la zone 12 : départ hâtif et prix record au débarquement

Le premier mois de capture et de transformation du crabe des neiges s’est déroulé dans un climat unanime de satisfaction en Gaspésie. Le départ précoce des pêcheurs, dans la nuit du 1er au 2 avril, et le bon rendement lors des semaines suivantes ont bien répondu à une préoccupation remontant à quelques années pour l’industrie gaspésienne.

Le 5 mai, une seule baleine noire avait été signalée dans le sud du golfe Saint-Laurent, après quatre semaines et demie de capture. Cette baleine avait été observée le 25 avril, à l’est des Îles-de-la-Madeleine, dans la zone 12F, qui génère 6 % du contingent global du sud du golfe.

La fermeture pendant 15 jours de neuf quadrilatères représentant une surface combinée de 2 000 kilomètres carrés est entrée en vigueur le 29 avril, mais elle a créé peu de désagréments pour les crabiers.

Cet impact limité de la baleine noire durant les 32 premiers jours de capture a été jumelé à des prises abondantes, précise Nicol Desbois, de Sainte-Thérèse-de-Gaspé, qui a parlé à Pêche Impact le 4 mai.

«Globalement, j’ai 80 % de mes quotas de pris. J’ai quatre bateaux là-dedans Ça a très bien été. Mes bateaux ont pris du crabe un peu partout, de la baie des Chaleurs aux Îles-de-la-Madeleine. Ça diminue un peu, mais c’est comme normal après un mois. C’est merveilleux, comme saison», a-t-il  abordé.

Le 4 mai, les crabiers de la zone 12 du sud du golfe Saint-Laurent avaient capturé 74 % du quota, en comptant les pêcheurs de quatre provinces, et les Premières Nations.

Nicol Desbois ose espérer que le secteur du crabe au Nouveau-Brunswick comprendra que commencer la pêche tôt procure de grands avantages, surtout depuis que les baleines noires fréquentent régulièrement le sud du golfe Saint-Laurent. Les crabiers du Nouveau-Brunswick ont toujours évoqué l’encombrement de certains havres de la Péninsule acadienne pour retarder le début de la saison.

«Traditionnellement, c’est le Nouveau-Brunswick qui décide (au sujet du début de saison). Ça va bien là-bas aussi cette année. J’espère qu’ils vont remarquer que ça va bien. Au nombre de pêcheurs qu’ils sont, ils peuvent casser la glace à l’entrée des ports. C’est une année révélatrice pour commencer la saison tôt», précise M. Desbois.

Il a réparti ses captures également entre les usines d’Unipêche MDM de Paspébiac et de E. Gagnon et Fils, de Sainte-Thérèse-de-Gaspé.

«Le prix a commencé à 5,75 $ la livre, mais ce n’est pas resté longtemps à ce niveau-là. On reçoit 8 $ la livre pour les bateaux avec des cales à glace et 8,50 $ pour les cales à eau. J’ai trois bateaux avec des cales à eau, et un avec une cale à glace. Ça fait plusieurs années que je n’ai pas vu un bon début de saison comme ça. Tout le monde a eu un bon début. C’est une saison exceptionnelle», conclut Nicol Desbois.

En transformation, Bill Sheehan, de l’usine E. Gagnon et Fils, rapportait le 4 mai qu’il s’attendait à avoir pris livraison le lendemain de 85 à 87 % du volume attendu pour la saison. Environ 350 employés sont affectés à la transformation aux installations de Sainte-Thérèse-de-Gaspé, et plus de 500 quand on compte l’administration, les manutentionnaires sur les quais et les camionneurs. Un volume de 7 millions de livres y est attendu cette année.

ARGUMENTATION PROUVÉE

«Je touche du bois pour que ça continue avant l’arrivée d’autres baleines, mais cette année, on prouve l’argument du Québec. La meilleure façon de ne pas avoir d’incidence des baleines noires, c’est        d’exploiter la ressource avant qu’elles arrivent. Ça va nous servir. On le demande depuis des années au Québec. Cette année, les zones sont ouvertes, la pêche est bonne. C’est du crabe des neiges! J’aime mieux avoir dans l’usine du crabe le 15 avril que le 15 juin et encore moins en juillet. Quand c’est chaud, c’est moins productif. J’espère que le ministère (des Pêches et des Océans) comprendra. Les pêcheurs du Nouveau-Brunswick peuvent laisser leurs bateaux au Québec, il est possible de briser la glace, comme cette année. L’an passé, du quota est resté à l’eau. Cette année, tout est beau, sauf le taux de change. Une baleine qui se prend dans une trappe à crabe, ça pourrait avoir des effets catastrophiques dans notre capacité de vendre sur le marché américain; 90 % du crabe se rend aux États-Unis. Le Japon et les Chinois l’auraient à pas cher», analyse M. Sheehan.

Généralement, dans le crabe, les usines offrent un prix de base en début de saison, et il reste fixe jusqu’au versement d’un ajustement en fin d’année, mais 2021 fait une rare exception. Il y a eu surenchère entre les usines en raison d’une demande très forte, découlant d’inventaires inexistants.

«On a commencé avec un prix plancher de 5,75 $ la livre, mais il a duré des heures, pas plus. Puis, on a payé 7 $ pour les cales à glace et 7,50 $ pour les cales à eau lors de la première semaine, et ensuite un dollar de plus. À 8 $ – 8,50 $ la livre, c’est un record. Dans le crabe, nous sommes craintifs de décoller haut parce que le début se fait toujours avec un prix-plancher, et parce que le rajustement de fin de saison se fait par le haut, de la première à la dernière livre», précise Bill Sheehan.

MAIN-D’ŒUVRE ÉTRANGÈRE

Les 40 Mexicains ont amorcé le travail   avec deux semaines de retard en raison de problèmes de tests de COVID. Dans l’intervalle, E. Gagnon et Fils a demandé aux travailleurs de ses trois autres usines, Dégust-Mer, aussi à Sainte-Thérèse-de-Gaspé, l’usine Caron de Cap-d’Espoir et celle de Shigawake, de venir travailler au complexe principal.

«Une chance que ces personnes sont venues nous aider, surtout pour les quarts de nuit. Les tempêtes ont aidé à prendre le dessus en retardant des débarquements, mais la production japonaise a été mise de côté. Au lieu de faire des emballages de deux ou cinq kilos pour le Japon, on a fait des contenants de 30 livres (14 kilos) pour le marché américain (…) On enverra 80 et même 90 % de nos produits aux États-Unis. On n’enverra rien au Japon, à moins qu’ils envoient des inspecteurs, ce qui est loin d’être évident avec la pandémie (…) Le reste de notre production ira au  Québec. On consomme notre part», note M. Sheehan.

Gino Lebrasseur, directeur d’Unipêche MDM, précisait le 4 mai que la compagnie avait complété près de 75 % de la transformation de crabe prévue aux usines de Paspébiac et de Grande-Rivière. Environ 350 personnes de divers départements y travaillent, pour une production de 4 millions de livres. Vingt-six travailleurs étrangers sont inclus dans ce groupe et ils sont logés dans l’ancien bar Don-Lynn, acquis par la firme.

«Cette année, le marché sera plus américain que japonais. On fera un peu de vente sur le marché asiatique», souligne M. Lebrasseur, qui se réjouit de la pêche hâtive en 2021.

«On a évité le stress de prendre les quotas et de faire travailler les gens sans que la baleine soit un facteur de risque, avec tout ce que comporte la protection de la baleine. C’est une chose à répéter. Ça prenait une première année. Les gens vont se préparer en conséquence l’an prochain. Nous, comme usine, on travaille pour être prêts tôt le printemps».

LE SUD DU GOLFE – page 6 – Volume 34,2 Avril-Mai 2021

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Gilles Gagné
Gilles Gagné, né à Matane, le 26 mars 1960. J'ai fait mes études universitaires à Ottawa où j'ai obtenu un baccalauréat avec spécialisation en économie et concentration en politique. À l'occasion d'une offre d'emploi d'été en 1983, j'ai travaillé pour Pêches et Océans Canada comme observateur sur deux bateaux basés à Newport, deux morutiers de 65 pieds. Le programme visait l'amélioration des conditions d'entreposage des produits marins dans les cales des bateaux et de leur traitement à l'usine. Cet emploi m'a ouvert des horizons qui me servent encore tous les jours aujourd'hui. En 1989, après avoir travaillé en tourisme et dans l'édition maritime à Québec, je suis revenu vivre en région côtière et rurale, d'abord comme journaliste à l'Acadie nouvelle à Campbellton. C'est à cet endroit que j'ai rédigé mes premiers textes pour Pêche Impact, à l'été 1992. Je connaissais déjà ce journal que je lisais depuis sa fondation. En octobre 1993, j'ai déménagé à Carleton, pour travailler à temps presque complet comme pigiste pour le Soleil. J'ai, du même coup, intensifié mes participations à Pêche Impact. Je travaille également en anglais, depuis près de 15 ans, pour l'hebdomadaire anglophone The Gaspé SPEC et je rédige l'éditorial du journal Graffici depuis 2007.
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