jeudi, novembre 21, 2024
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André Lamontagne qualifie la réouverture prochaine de la pêche au sébaste d’incontournable opportunité pour l’industrie québécoise

Dominée par la transformation de volumineux tonnages de homard et de crabe des neiges, l’industrie québécoise de la pêche a su tirer son épingle du jeu en 2023, selon le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ), André Lamontagne. En entrevue exclusive avec Pêche Impact, il constate que les débarquements de ces crustacés ont continué de croître et que, malgré la baisse importante du prix du crabe en particulier, les problèmes de surplus d’inventaires non vendus vécus l’an dernier pour cette  espèce se sont résorbés.

«Au-delà des fluctuations d’une année à l’autre, le potentiel est en santé et le potentiel est là autant au niveau de la capture que de la transformation, se félicite-t-il. Et il n’y a rien qui indique qu’on ne continuera pas à tirer notre épingle du jeu, à moins qu’il y ait encore de grands bouleversements géopolitiques qui viendraient briser notre élan.»

Cela dit, M. Lamontagne note que les «signaux au rouge» en ce qui concerne la crevette et le turbot se sont confirmés, cette année. À son avis, la baisse radicale de leurs captures respectives fait ressortir l’importance d’avoir une «vision, de la bonne information pour prendre les bonnes décisions». «Ça amène aussi l’importance d’une concertation, mais pas ponctuelle, souligne le ministre québécois responsable des Pêcheries du Québec. Une concertation qui est toujours en réalisation. Et c’est un peu ça qu’on a cherché à déclencher quand je suis allé en Gaspésie au début de l’été, et qu’on a ensuite mis en place un comité avec les transformateurs, la capture, le MAPAQ, pour faire un suivi de l’évolution et regarder comment on peut reprendre le poil de la bête de cette décroissance.»

Questionné sur la façon dont il avait  accueilli le récent rapport du Commissaire à l’environnement et au développement durable du Bureau du vérificateur général du Canada, selon lequel le ministère des Pêches et des Océans n’arrive justement pas à recueillir des données fiables pour  assurer une saine gestion des pêcheries – un problème pourtant soulevé il y a sept ans déjà – André Lamontagne n’a pas caché sa stupéfaction.

«Quand j’ai pris connaissance de ça, si j’avais eu un café dans les mains, je me serais étouffé dans mon café!, nous a-t-il déclaré. S’il y a une affaire dont on a besoin, avec les défis qui s’en viennent et les décisions qu’on attend du ministère des Pêches et des Océans au niveau de l’allocation des ressources, c’est bien de la confiance dans le data. Il faut qu’on ait confiance dans toute la démarche scientifique sous-tendant ça. […] Ça fait que c’est sûr que c’est un sujet que je vais aborder avec la ministre Diane Lebouthillier, parce qu’il faut qu’on ait en main des données qui soient probantes et fiables pour bien planifier nos capacités futures de pêche et de transformation.»

SÉBASTE

D’autre part, le ministre Lamontagne qualifie la reprise tant attendue de la pêche commerciale au sébaste «d’incontournable opportunité» pour l’industrie. Or, bien que cette relance s’annonce déficitaire le temps qu’on parvienne à développer de nouveaux marchés et à mettre au point des produits à valeur ajoutée, il se garde de se prononcer dès maintenant sur les mesures que le MAPAQ pourrait mettre en place pour combler les pertes d’opération appréhendées. «La première des choses c’est d’avoir le GO! pour cette pêche-là, de savoir quels seront les quotas de capture et comment on va fonctionner, résume-t-il. C’est un dossier qui va être en évolution et on va être en accompagnement avec cette évolution-là, comme on l’est de toutes les façons possibles, au jour le jour et année après année, avec notre industrie.»

Pour ce qui est des usines gaspésiennes de traitement de la crevette incertaines de leur avenir, mais qui n’ont pas de permis de transformation de poisson de fond leur permettant de se diversifier dans le sébaste, M. Lamontagne dit faire confiance au processus d’analyse du Comité d’intérêt public. C’est cette instance qui conseille le ministre avant sa prise de décision sur l’émission de nouveaux permis. «Étant donné que c’est une nouvelle opportunité et de nouveaux défis qui vont se présenter, il s’agira d’être à l’affût pour répondre de la bonne façon aux gens qui vont manifester de l’intérêt, soutient-il. Je fais confiance en la mécanique en place pour être capable de s’adapter à cette nouvelle réalité et ces nouvelles opportunités qu’on va vouloir saisir.»

CONSULTATION À VENIR

Cependant, André Lamontagne nous annonce que le MAPAQ a refusé la demande de la nouvelle Coopérative de pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine pour l’obtention d’un permis d’acquéreur (Pêche Impact, juin 2023). Selon nos informations, tant des acheteurs des Îles que de la Gaspésie se sont prononcés contre parce qu’ils estiment que ce serait de la concurrence déloyale que d’émettre un tel permis gratuitement alors qu’il en coûte plusieurs millions de dollars lors de transferts d’entreprises. Le ministre Lamontagne précise que c’est un comité ad hoc bien distinct du Comité d’intérêt public – qui lui ne se penche que sur les permis de transformation en usine –  qui a évalué la demande.

«Il n’y a pas eu de consensus, relève le ministre. Ce qui a été convenu c’est qu’il n’y a pas eu d’émission de permis depuis 2007 et qu’il y a un équilibre en place. […] On parle de chiffres d’affaires qui sont grandissants et qui sont rendus, juste pour les Îles au cours de la dernière année, de plus de 115 millions$. C’est une augmentation de 10% si on se compare à 2021. Ça fait que d’aller jouer là-dedans, il faudrait que ça se fasse de façon bien réfléchie. Et c’est dans cette optique-là que le ministère a présenté le refus à la Coop.»

Au moment d’aller sous presse, la Coopérative de pêcheurs de homard des Îles-de-la-Madeleine disposait toujours d’une période totalisant 20 jours pour répondre au refus ministériel et tenter de faire inverser la décision. André Lamontagne reconnaît par ailleurs que le contexte entourant le commerce du homard vivant a changé depuis 16 ans, avec l’explosion des captures sous l’effet des changements climatiques, entre autres.

D’autre part, M. Lamontagne nous informe que le MAPAQ lancera prochainement une vaste consultation publique pour examiner la pertinence d’accueillir de nouveaux joueurs au sein de cette industrie. «On a décidé de prendre du recul et de faire un travail exhaustif pour voir ce qu’il faudrait changer par rapport au régime actuel, advenant qu’on émette un ou de nouveaux permis d’acquéreurs. À quelle condition ça pourrait se faire? Quels en seraient les bénéfices? Alors la consultation va nous donner assez de matériel pour décider si oui ou non il devrait y avoir émission d’un ou de nouveaux permis d’acquéreur et si oui, à quelles conditions.»

Les trois régions du Québec maritime seront consultées sur la question, fait valoir le ministre Lamontagne. «On va aller écouter les pêcheurs, les industriels, les représentants des milieux autochtones, les municipalités, les organismes locaux, le MEI (ministère de l’Économie et de   l’Innovation), le MAMH (ministère des Affaires municipales et de l’Habitation), tout le monde!»

André Lamontagne précise que le rapport de cette consultation devra être déposé sur son bureau dès le printemps prochain.

SCÈNE PROVINCIALE – pages 10-11 – Volume 36,5 Décembre 2023-Janvier 2024

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Hélène Fauteux
Hélène Fauteux est diplômée en communications et journalisme de l'Université Concordia. Établie aux Îles-de-la-Madeleine depuis 1986, elle a développé une solide expertise en matière de pêche et de mariculture.
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