La production maricole 2015 des Îles-de-la-Madeleine totalise les 300 tonnes, en légère progression par rapport à l’année précédente. Ce bilan positif tient compte des pertes enregistrées au printemps par La Moule du Large, à cause de la prédation par les canards de mer, dans la baie de Plaisance.
Le biologiste François Bourque, conseiller en aquaculture à la direction régionale du ministère québécois des Pêcheries, explique que les quatre entreprises aquacoles du territoire ont toutes diversifié leurs élevages. «Si on regarde le portrait, il y a trois, quatre ans, l’ensemble des entreprises ne cultivaient qu’une espèce, souligne-t-il. Maintenant on a quatre entreprises qui cultivent au moins deux espèces. Donc une bonne diversification dans les huitres en lagune, on devrait commencer à voir des retombées positives de ça d’ici un an.»
PECTINICULTURE DÉLAISSÉE
Ainsi, il y a désormais de la culture d’huitre dans tous les plans d’eau du territoire madelinot, précise monsieur Bourque. Cependant, il nous apprend du même souffle que Culti-Mer est à se retirer progressivement de l’élevage du pétoncle géant. Pour 2016, l’unique entreprise pectinicole du territoire a notamment renoncé à ses baux sur les sites de captage et de grossissement de naissains dans la baie de Plaisance. «C’est un autre coup dur, un peu, avec la prédation des canards, admet le conseiller du MAPAQ. Mais c’est un choix d’entreprise. Ça n’a pas été tellement facile au cours des dernières années, l’élevage du pétoncle, avec l’augmentation de la température de l’eau, principalement dans la lagune de Havre-aux-Maisons. Le pétoncle, c’est une espèce d’eau froide.» Le président-directeur général de Culti-Mer, Sylvain Vigneau, préfère lui-même ne pas commenter ces difficultés liées aux changements climatiques, ni son changement de cap.
Une consolation néanmoins : l’élevage des myes à des fins d’ensemencement dans la baie du Cap Vert de la lagune de Havre-aux-Maisons pourrait être relancé au cours de la prochaine année. Des discussions sont en cours pour le transfert des baux des sites jusqu’ici détenus par PGS Noël. Lorsqu’elle a cessé ses activités en 2013, cette dernière avait encore une production d’environ un million de coques à récolter.
PLAN DE COMMUNICATION
Et pendant ce temps, le Regroupement des mariculteurs du Québec (RMQ) a entrepris une campagne d’information, cet automne, par le biais des médias des centres urbains, pour mieux faire connaitre les productions aquacoles de ses membres auprès des consommateurs. C’est sa directrice, la biologiste Sophie Fortier, qui en est la porte-parole. Elle explique que le besoin de cette campagne d’information a été identifié comme l’une des priorités du nouveau plan de communication du RMQ, déposé en septembre, «pour que, de la part des consommateurs, vienne la demande, dit-elle. Pour que vienne la demande, c’est très clair qu’il faut que les Québécois, les grands centres principalement, connaissent que la mariculture existe, sachent qu’on produit au Québec des moules, des huitres, des pétoncles, principalement.»
À ce propos, le professeur Réjean Tremblay, de l’Institut des sciences de la mer de l’Université du Québec à Rimouski, note justement que la commercialisation des produits de la mariculture québécoise reste difficile parce que les Québécois n’en sont toujours pas de grands consommateurs. Pourtant, ce spécialiste de l’aquaculture fait valoir que ce sont des produits bons pour la santé. «Faibles en cholestérol, riches en oméga-3, il y a plein de vertus des produits de la mer, dit-il. Donc, c’est sûr que si mettre un peu plus de produits de la mer dans nos assiettes quotidiennement ou même chaque semaine, ça aiderait le développement de la mariculture.»
Or, l’industrie québécoise fait également face à une importante concurrence, tant des marchés extérieurs que domestiques, poursuit le professeur Tremblay. Par exemple, il fait remarquer que les moules de l’Île-du-Prince-Édouard comptent à elles seules pour plus de 90% de la production de l’Amérique du Nord. «Les grands acheteurs ce qu’ils veulent, c’est un produit disponible à l’année et en quantités suffisantes pour pouvoir subvenir à tous leurs marchés. C’est sûr que si on veut rentrer sur le marché de Métro, bien il y a plusieurs épiceries Métro. Ça fait qu’il faut réussir à avoir un produit qui soit distribué dans toutes ces épiceries-là. Donc, ce n’est pas évident non plus», concède le professeur.
SITE INTERNET
Il y a cinq ans, la production maricole québécoise frisait les 400 tonnes métriques, ce qui représente à peine 1% de l’ensemble de la production aquacole canadienne. Cette donnée provient du site Internet du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec, mais elle n’a pas été mise à jour depuis 2012. C’est d’ailleurs pour palier cette lacune que le RMQ lancera bientôt son propre site Web. «Dans le site, on va pouvoir retrouver les documents que les gens recherchent et ont de la difficulté à mettre la main dessus, précise Sophie Fortier. Il va aussi y avoir de beaux portraits des mariculteurs pour mieux faire connaitre les enjeux et les défis auxquels ils font face : leur histoire, ce qu’ils font, comment ils vivent, leurs projets de développement d’entreprise.»
Cela dit, le Regroupement des mariculteurs du Québec est en attente du renouvellement de son entente triennale de financement avec le ministère québécois des Pêcheries. Sophie Fortier précise que son plan de communication a été financé au cout de 15 000 $ par la Conférence régionale des élus de la Gaspésie et des Îles, tout juste avant sa dissolution l’an dernier.
MARICULTURE – page 27 – Volume 29,1 – Février – Mars 2016