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La biomasse commerciale de crabe des neiges explose et le TAC pourrait bondir à 43 822 tonnes

Il est toujours hasardeux de faire de la perspective plusieurs semaines avant le début d’une saison de pêche, mais les astres semblent alignés pour que les crabiers et les transformateurs évoluant dans le sud du golfe du Saint-Laurent connaissent une saison 2017 dont tout le monde se rappellera longtemps.

Quatre éléments, méritant tous des explications, courent la chance de revenir régulièrement dans les conversations des prochains mois, à savoir «recrutement, prix élevés, quotas doublés et saut de mue.»

La biomasse de crabes adultes de taille commerciale disponible pour la capture dans les quatre zones de pêche du sud du golfe, soit les zones 12, 19, 12E et 12F a augmenté de 68,6% comparativement à la saison 2016. Cette biomasse se situe maintenant à 99 145 tonnes métriques. Elle était de 58 808 tonnes avant la saison 2016.

De plus, en raison d’une baisse de 68% des quotas de crabe des neiges au cours des deux derniers hivers en Alaska, les prix pourraient atteindre un niveau record en avril et en mai, en raison d’une demande forte attendue venant du marché américain, le principal débouché du crabe des neiges venant du sud du golfe Saint-Laurent.

Le biologiste Matthew Hardy, du ministère fédéral des Pêches et des Océans, précise que cette biomasse commerciale de 99 145 tonnes constitue un phénomène assez rare.

«C’est proche du record. La plus haute valeur qu’on avait eue, c’était 103 429 tonnes, en 2005», signale monsieur Hardy.

«La zone 12 représente encore la vaste majorité de la surface du sud du golfe et nous faisons encore une analyse tenant compte de la répartition de la biomasse pour chacune des 4 zones concernées. La zone 12 reste en tête avec 89 878 tonnes (pour 91,3% du total du sud du golfe). C’est 6 667 tonnes pour la zone 19 (ou 6,8%), puis 441 tonnes (et 0,4%) pour la zone 12E, et 1 469 tonnes (pour 1,5%) dans la zone 12F», spécifie le biologiste.

Trois zones-tampons totalisant 670 tonnes sont fermées à la pêche pour des raisons d’observation scientifique.

Les relevés menant à cette évaluation ont été effectués entre le 10 juillet et le 14 octobre 2016, par l’équipage de scientifiques et de pêcheurs évoluant sur le Jean-Mathieu, à partir de 355 stations d’échantillonnage.

Ces relevés ont permis d’établir que pour les zones 12, 19, 12E et 12F, le recrutement, c’est-à-dire l’arrivée dans la pêche de nouveaux crabes de taille commerciale, a atteint 74 269 tonnes métriques. C’est une hausse de recrutement remarquable de 112,6%, si l’on tient compte que ce recrutement avait atteint 34 929 tonnes avant la saison 2016. C’est donc dire que la biomasse résiduelle s’est chiffrée par 24 876 tonnes suite à la saison 2016, comparativement à 24 022 tonnes un an auparavant.

Un tel recrutement s’explique par un phénomène rare, précise Matthew Hardy.

«C’est un saut de mue. L’année dernière, il y a eu moins de crabes recrutés dans la pêche commerciale. On ne connaît pas les raisons, mais toute une cohorte n’a pas mué, n’a pas changé de carapace», souligne le biologiste à propos de cet élément important pour la croissance des crabes et leur passage dans la taille commerciale.

L’hypothèse du saut de mue avait été bien identifiée lors du relevé scientifique de 2015, préalable à la saison de pêche 2016.

«Cette cohorte qui a fait un saut de mue est donc arrivée dans la taille commerciale en même temps qu’une autre cohorte, celle qui était supposée faire son entrée dans la pêche cette année. C’est comme si, à l’école, une classe de 11e année et une classe de 10ième année arrivaient en même temps en 12e année», explique monsieur Hardy.

Une biomasse commerciale de 99 145 tonnes métriques laisse entrevoir une quantité de ressources considérable, qui se situe dans la «zone saine» de l’approche de précaution, cette entente entre les pêcheurs et les gestionnaires publics du crabe des neiges ayant pour but de déterminer des contingents de capture, à travers les règles de décision.

En vertu de cette approche, le total des prises admissibles pourrait atteindre un volume fort élevé en 2017.

«Pour le sud du golfe, il pourrait atteindre 43 822 tonnes métriques, si le taux d’exploitation est aligné sur l’approche de précaution. Ça se discute au comité consultatif, dans ce cas-ci le 1er mars. Si on applique les règles de décision, le taux d’exploitation sera de 44,2%. Ce n’est jamais officiel avant le comité consultatif. Depuis la mise en place des règles de décision, ça nous donne une bonne idée du contingent», précise Matthew Hardy.

Un contingent global de 43 822 tonnes métriques pour les zones 12, 19, 12E et 12F viendrait plus que doubler le contingent de 2016 qui avait atteint 21 611 tonnes. Il s’agirait d’une hausse vertigineuse de 102,75% du contingent, comparativement à l’année précédente. En 2016, le taux d’exploitation de la biomasse disponible pour la pêche avait atteint 36,9%.

La zone 12, dominante parmi les quatre zones du sud du golfe du Saint-Laurent, bénéficierait d’une hausse de contingent encore plus forte, à 104,85%, ce qui le propulserait de 19 393 tonnes en 2016 à 39 983 tonnes en 2017.

Pour la zone 19, le quota projeté est de 2 949 tonnes, soit une augmentation de 73,37% par rapport aux       1 701 tonnes de 2016. Dans 12E, la situation évolue aussi, puisque le contingent montera à 202 tonnes, comparativement aux 144,9 tonnes en 2016. C’est un bond de 35,96%. Enfin, dans 12F, le quota devrait augmenter de 84,1%, à 688 tonnes, alors qu’il était de 373,7 tonnes en 2016.

QUE PEUT-ON ATTENDRE POUR 2018 ?

L’année 2017 reste à faire en matière de captures mais bien des gens du secteur du crabe se demandent déjà ce qui se passera dans un an.

De façon générale, Matthew Hardy précise que le relevé scientifique de 2016 a démontré des signes encourageants pour l’avenir, en ce sens qu’il y avait une bonne présence de petits spécimens.

«On continue de voir des petits crabes. Avec la qualité d’échantillonnage qu’on réalise, on peut voir ces très petits crabes, jusqu’à trois ans précédant l’entrée de ces spécimens dans la pêche», note le biologiste.

«On essaie de faire une prévision de ce qu’un recrutement futur pourrait être. On peut dire que 2018 ne sera pas comme 2017. On s’entend pour dire qu’on retombe à des niveaux à l’intérieur de la moyenne, mais un niveau respectable», analyse Matthew Hardy.

Historiquement, les taux d’exploitation ont varié significativement dans le sud du golfe Saint-Laurent, quand on regarde les deux dernières décennies. Ce taux a varié entre 20,8% et 45% entre 1998 et 2014.

D’autre part, un aperçu des statistiques de 2016 révèle que les captures ont atteint 19 499 tonnes dans la zone 12, un peu plus que le quota de 19 171,7 tonnes. La pêche s’y est déroulée entre le 22 avril et le 14 juillet.

Dans la zone 19, les captures ont atteint 1 701 tonnes alors que le quota se situait à 1 668,7 tonnes. Les crabiers y ont évolué entre le 13 juillet et le 16 août. Dans 12E, les pêcheurs ont stoppé leurs prises à 126 tonnes, alors que le quota y était de 144,9 tonnes. La saison a débuté le 22 avril et elle a été stoppée le 10 juin. Dans la zone 12F, la pêche a débouché sur des prises de 381 tonnes, légèrement plus que le quota de 373,7 tonnes. Amorcée le 13 avril, elle a pris fin le 27 juin. Le quota du relevé scientifique a été de 400 tonnes, ce qui a donné des prises totales de 21 758 tonnes métriques.

La zone 12 est fréquentée par 291 bateaux, des crabiers traditionnels et des détenteurs de permis faisant partie de la catégorie «nouvel accès». Les détenteurs de permis viennent en majorité du Nouveau-Brunswick, mais les Gaspésiens et les Madelinots y détiennent une part importante des contingents.

Dans la zone 19, les 103 bateaux participants venaient tous du Cap Breton, en Nouvelle-Écosse, en 2016. Quatre crabiers traditionnels ont été actifs dans la zone 12E en 2016, deux du Nouveau-Brunswick, un du Québec et un de l’Île-du-Prince-Édouard. La zone 12F a été fréquentée par seize crabiers traditionnels et quatre détenteurs de quotas temporaires en 2016. Dix crabiers venaient des Îles-de-la-Madeleine et six du Cap-Breton.

LE SUD DU GOLFE – page 2 – Volume 30,1 – Février-Mars 2017

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Gilles Gagné
Gilles Gagné, né à Matane, le 26 mars 1960. J'ai fait mes études universitaires à Ottawa où j'ai obtenu un baccalauréat avec spécialisation en économie et concentration en politique. À l'occasion d'une offre d'emploi d'été en 1983, j'ai travaillé pour Pêches et Océans Canada comme observateur sur deux bateaux basés à Newport, deux morutiers de 65 pieds. Le programme visait l'amélioration des conditions d'entreposage des produits marins dans les cales des bateaux et de leur traitement à l'usine. Cet emploi m'a ouvert des horizons qui me servent encore tous les jours aujourd'hui. En 1989, après avoir travaillé en tourisme et dans l'édition maritime à Québec, je suis revenu vivre en région côtière et rurale, d'abord comme journaliste à l'Acadie nouvelle à Campbellton. C'est à cet endroit que j'ai rédigé mes premiers textes pour Pêche Impact, à l'été 1992. Je connaissais déjà ce journal que je lisais depuis sa fondation. En octobre 1993, j'ai déménagé à Carleton, pour travailler à temps presque complet comme pigiste pour le Soleil. J'ai, du même coup, intensifié mes participations à Pêche Impact. Je travaille également en anglais, depuis près de 15 ans, pour l'hebdomadaire anglophone The Gaspé SPEC et je rédige l'éditorial du journal Graffici depuis 2007.
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