Les pêcheurs de homard de la Gaspésie sont optimistes pour la saison de pêche 2020. Leur première semaine d’activités en mer laisse entrevoir des résultats satisfaisants. Au moment de procéder aux entretiens, le prix offert au débarquement n’était pas encore connu officiellement, mais le chiffre de 6 $ la livre circulait et c’est finalement un prix de 6,40 $ qu’ils ont obtenu. Toutefois, l’ensemble des pêcheurs interrogés ne prenaient rien pour acquis pour les prochaines semaines.
Pêcheur à Saint-Georges-de-Malbaie, Mitch Girard possède un permis pour 335 casiers. Au retour de sa première semaine en mer, celui-ci retient : «À part les vents, les captures sont vraiment bonnes. C’est stable tous les jours et c’est égal partout. Le homard n’a pas frappé encore et on ramasse déjà de bonnes quantités. Alors ça va devenir encore meilleur.»
- Girard reconnait toutefois que l’état actuel de la situation est loin d’être assurée pour la balance de la saison alors que plusieurs facteurs pourraient influencer son déroulement : «Il y a toujours des inquiétudes à savoir si on va être dérangés par la COVID-19, si on va l’attraper nous-mêmes ou si le marché va tomber à cause de ça. Il y a aussi plusieurs choses qui peuvent avoir un impact sur nous, comme la baleine noire, en plus des marchés, virus ou pas.»
À l’Anse-à-Beaufils, Jean-Eudes Cloutier affirme que ses sept premiers jours de pêche se sont bien déroulés. «Ç’a bien été. Si on avait commencé plus tôt, il aurait trop venté et on n’aurait pas fait de bonnes prises. Donc on n’a pas perdu grand-chose en commençant plus tard», dit-il. Ce dernier affirme que le homard remplit bien ses casiers : «Les captures sont au rendez-vous malgré le fait qu’on s’est fait brasser par le vent. Je suis satisfait des prises qu’on a faites. C’est moins bon que l’an dernier, mais il faut dire que l’an pas-sé c’était une année exceptionnelle. Je pêchais 1 000 livres quasiment tous les jours. Cette année, j’ai pêché 1 000 livres la première journée et ensuite entre 600 et 800 livres.» M. Cloutier est optimiste face à l’engouement des québécois pour les produits locaux. «Le panier bleu qu’on annonce à la télévision, ça fait du bien. Les gens vont acheter les produits d’ici.» Son plus grand souhait est d’ordre climatique : «Il faut que la mer gèle en décembre. Lors de la tempête qu’on a eu l’automne passé, beaucoup de homard s’est ramassé sur les plages. C’est important que les glaces arrivent avant le mois de décembre.»
Un peu plus vers l’Ouest, à Sainte-Thérèse-de-Gaspé, Maxime Lelièvre est lui aussi satisfait de son début de saison. «Ça s’est quand même bien déroulé, on a eu une première journée record, et ensuite on a eu du vent, ce qui a joué sur les pesées. La ressource est là, ça ressemble à l’année passée et l’année d’avant», affirme-t-il. Maxime Lelièvre centre ses préoccupations sur ce qu’il peut contrôler et évite de s’en faire pour la COVID-19 ou les marchés. Son plus grand souhait cette année : «Une belle température pour qu’on puisse pêcher tous les jours qui nous sont accordés.»
À Chandler, Jean-François Huard s’est fait brasser par les vagues : «La première semaine se résume pas mal à une température froide et du temps venteux, rien pour aimer la pêche, en espérant que le beau temps s’en vient. Il y a une journée où je n’ai pas sorti. Avec l’équipage, on a rebroussé chemin, c’était trop ‘’rough’’.» Les conditions météo ne l’ont pas aidé à obtenir des résultats satisfaisants. «L’eau est très froide et quand ça brasse ce n’est pas l’idéal. Si on compare date pour date avec l’an dernier, on est en dessous de 30 % de ce qu’on pêchait», dit-il. Malgré tout, M. Huard n’est pas inquiet pour les semaines à venir. «Ce qui est le plus inquiétant, c’est le marché», dit-il en sous-entendant que beaucoup d’incertitude plane compte tenu de la COVID-19. Jean-François Huard souhaite que la saison puisse se dérouler sur dix semaines et que le marché tienne bon pour assurer la rentabilité de la pêche cette année.
Finalement, du côté de Port-Daniel-Gascons, Guy Desbois bat des records. «Dans notre secteur, la semaine s’est très bien passée. On a eu beaucoup de vent de nord, nord-ouest. Il faisait froid mais on a pêché toute la semaine. C’est meilleur que d’habitude, au moins 70 % de plus que l’an passé. C’est ma meilleure semaine à vie depuis que je pêche le homard», raconte-t-il. Ce dernier rapporte ne pas s’inquiéter pour la COVID-19 à bord de son bateau, mais plutôt pour la stabilité des marchés. Il souhaite pouvoir pêcher toute la saison et obtenir un prix raisonnable pour le homard.
LA GASPÉSIE – pages 8-9 – Volume 33,2 Avril-Mai 2020