Les exportateurs de poissons et fruits de mer devront se soumettre à de nouvelles restrictions pour conserver leurs marchés américains. C’est que les États-Unis ont décidé, au mois d’août dernier, de renforcer l’application du Marine Mammal Protection Act adopté en 1972.
Le Canada souscrit à la démarche visant à minimiser les interactions avec les mammifères marins des activités de pêche et des opérations aquacoles, explique Nadia Bouffard, directrice générale des relations externes au ministère des Pêches et des Océans. «Mais, on veut s’assurer aussi que ça se fasse avec un impact minimal sur l’industrie canadienne et que ce ne soit pas, justement, des barrières aux transactions et aux marchés qui existent depuis plusieurs années entre le Canada et les États-Unis», affirme la haute-fonctionnaire.
ANALYSE DE COMPARABILITÉ
La NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration) fera connaître la liste des pêches assujetties en cours d’été. Pêches et Océans Canada devra ensuite démontrer quelles sont ses mesures de gestion pour en atténuer l’impact sur les mammifères marins. Madame Bouffard précise que les Américains analyseront ces mesures dans le cadre d’un processus de comparabilité. «Ce qu’ils vont faire, c’est qu’ils vont comparer ces pêches et ces opérations aquacoles aux mesures qui sont en place aux États-Unis pour des pêches et des opérations similaires.»
RÉACTIONS MITIGÉES
Les deux tiers des exportations canadiennes de poissons et fruits de mer sont dirigés vers les États-Unis. Les nouvelles restrictions du marché américain, en vertu du Marine Mammal Protection Act, entreront en application en janvier 2022.
Le pêcheur semi-hauturier Denis Éloquin, de Grande-Entrée, s’en déclare préoccupé. Il qualifie d’inquiétante l’accumulation des exigences gouvernementales pour protéger les ressources océaniques de l’impact des pêches commerciales. «Les interférences avec les mammifères marins, c’est la première fois que c’est fait, observe le capitaine du JEAN-MATHIEU. Mais la différence, la ligne est mince entre les deux. Où ça va arrêter? On ne le sait pas. Si tu parles de filets maillants ou de chalutage, à la grandeur de l’Amérique du Nord, ils veulent restreindre le chalutage le plus possible. Et cela, ça nous inquiète vraiment.»
Pour sa part, le directeur général de l’Association québécoise de l’industrie de la pêche, Jean-Paul Gagné, est plus serein. Il dit que ses membres sont habitués aux exigences toujours croissantes des marchés. «Ç’a commencé par le HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point – système d’analyse des risques et de maîtrise des points critiques), pis le MSC (un référentiel environnemental permettant de montrer qu’une pêcherie est durable et bien gérée), pis tout ce que tu voudras, sans oublier le GFSI (normes de sécurité alimentaire priorisant certains référentiels de qualité). Maintenant que les États-Unis changent leur réglementation, on va être obligés de s’y conformer de toute façon, souligne-t-il. On sait que ça va être du travail supplémentaire, mais on ne panique pas encore avec ça.»
D’ailleurs, monsieur Gagné prévoit que les restrictions américaines qui seront imposées dans cinq ans affecteront peu les espèces pêchées au Québec. Il admet néanmoins que la prolifération des phoques gris sur les fonds de pêche traditionnelle au homard de l’île Brion pourrait poser problème.
Réf.: EXPORTATIONS – page 32 – Volume 30,2 – Avril-Mai 2017