Avec les modifications à la Loi sur les pêches annoncées par Ottawa au début février, le gouvernement Trudeau désire notamment protéger l’indépendance des capitaines exploitants indépendants, propriétaires de flottes de pêche côtière et semi-hauturière.
«À travers mon voyage au Québec et dans les provinces maritimes, je constate combien les propriétaires exploitants indépendants de petits bateaux font partie intégrante de l’économie régionale, a déclaré le ministre des Pêches et des Océans, Dominic LeBlanc, lors de sa visite à l’Institut Maurice-Lamontagne de Mont-Joli, le 7 février. Je le vois en regardant par les fenêtres de ma maison du Nouveau-Brunswick. Je le vois sur les quais. J’ai monté à bord des bateaux de pêche et j’ai entendu à quel point il est important de préserver l’indépendance des flottes de pêche côtière et semi-hauturière.»
LES BÉNÉFICES AUX TITULAIRES D’UN PERMIS
Le fédéral veut ainsi s’assurer que les bénéfices de la pêche reviennent aux pêcheurs titulaires d’un permis de pêche et aux communautés côtières dont l’économie dépend de ces ressources.
Selon le ministre, ces principes se trouvaient, depuis quarante ans, uniquement dans les politiques ministérielles. «Le moment est désormais venu de les consacrer dans la législation pour leur donner force de loi, a-t-il soutenu. Une fois adoptée, la loi reconnaîtra le pouvoir du ministre de tenir compte de tout facteur social, économique et culturel en vue de préserver et de promouvoir l’indépendance de la pêche commerciale côtière. De plus, les règlements en vertu de la Loi sur les pêches permettront d’assurer que ces politiques soient appliquées et exécutées de façon rigoureuse et efficace. Nous devons nous assurer que nos politiques soient musclées, car, bien que beaucoup de choses aient changé en quatre décennies, la réalité du pêcheur côtier, elle, n’a pas changé beaucoup.»
Pour Dominic LeBlanc, la loi vise à protéger le pêcheur propriétaire exploitant qui est à bord du bateau. «C’est cette personne-là qui sera propriétaire du permis, a-t-il précisé. On ne veut pas se retrouver avec des circonstances où les usines de transformation, par exemple, fassent ce qu’elles n’ont pas le droit de faire directement, soit d’être propriétaires de ces permis de pêche.»
AUGMENTER LA CAPACITÉ D’EXPLOITATION DES COMMUNAUTÉS AUTOCHTONES
Le ministre des Pêches et des Océans souhaite augmenter la capacité des communautés autochtones à exploiter elles-mêmes leurs pêches. «Souvent, les permis pour les collectivités autochtones sont des permis communautaires, a-t-il rappelé. Alors, c’est la collectivité qui reçoit une allocation et l’accès aux pêches. Je ne veux pas qu’on se trouve dans une situation où on donne une allocation à une collectivité autochtone qui vend ce contingent-là sur une base permanente et continuelle à une compagnie ou à une organisation qui est non autochtone.»
Selon M. LeBlanc, il importe que les communautés autochtones exploitent elles-mêmes la ressource afin de développer leur autonomie. «Les nations autochtones de la Gaspésie sont parmi les meilleurs exemples sur la côte est du Canada, estime le ministre. Elles ont des bateaux pour aller à la pêche au crabe des neiges, à la crevette et au homard. On veut continuer à donner plus de capacité à ces communautés autochtones de la Gaspésie et répéter le même succès aux autres régions du Canada Atlantique.»
PROTECTION ACCRUE À L’HABITAT DU POISSON
Les modifications à la Loi sur les pêches ajoutent également de nouvelles mesures de protection importantes visant à rétablir les stocks de poisson épuisés et à restaurer les habitats dégradés. «Nous nous sommes engagés, lors de la campagne électorale, à restaurer les protections, surtout pour l’habitat du poisson, a indiqué le ministre LeBlanc. C’était des mesures qui avaient été légiférées dans les années 70. Alors, nous pensons qu’en 2018, avec les effets des changements climatiques, les pêches illégales pas rapportées et les stocks de poisson qui voyagent à travers le monde, on a énormément besoin de moderniser la Loi sur les pêches, de donner des outils modernes au gouvernement et à l’industrie afin d’appliquer la Loi sur les pêches. Nous avons répondu à l’appel des groupes environnementaux.»
Les modifications à la Loi sur les pêches s’accompagnent d’un investissement du gouvernement du Canada de 284,2 millions $ réparti sur cinq ans. «On va se donner des effectifs, surtout des officiers de pêche pour la protection de l’habitat, a décrit M. LeBlanc. Ils auront aussi des fonctions scientifiques. La planification maritime sera incluse dans leur travail.» Pour l’Institut Maurice-Lamontagne, ce programme permettra l’ajout d’une quinzaine d’emplois.
Le ministre a rappelé que sous le gouvernement de Stephen Harper, les emplois d’officiers de protection des pêches avaient connu des suppressions de 30 à 40%. «On va embaucher des nouvelles personnes qui vont aussi travailler sur les quais, les bateaux et les rivières du Québec et de partout au Canada», a-t-il spécifié.
Avant d’en arriver à ces modifications à la Loi sur les pêches, le gouvernement a invité les Canadiens à faire part de leurs idées. «La réponse a été incroyable, a mentionné le ministre LeBlanc. Nous avons eu des milliers de lettres et de courriels. Nous avons tenu des centaines de réunions avec des partenaires, des parties prenantes et des groupes autochtones. Des dizaines de milliers de Canadiens ont participé en ligne à deux phases de consultation publique. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec nos partenaires provinciaux et territoriaux partout au pays, pour nous assurer que leurs préoccupations soient entendues et prises en compte. Le Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes a aussi étudié les mesures de protection perdues. Il a entendu cinquante témoins et reçu au-delà de cent quatre-vingts mémoires. Le comité a formulé des recommandations qui ont contribué, d’une façon importante, à façonner le projet de loi qui a été présenté par le gouvernement à Ottawa.»
RAPPEL HISTORIQUE
Dominic LeBlanc a souligné que, pour lui, cette annonce revêtait un caractère personnel et historique. Il y a quarante ans, son père, Roméo LeBlanc, qui occupait alors les mêmes fonctions, avait intégré des mesures de protection pour l’habitat du poisson à la loi sur les pêches. «Il comprenait que, pour que nos pêches soient prospères, nous devions tenir compte de la santé de nos eaux, a-t-il rappelé. Nous allons aller plus loin, avec des protections et des mesures modernes qui comprennent les menaces à l’habitat du poisson, puisque les stocks de poisson sont différents en 2018 qu’ils l’étaient en 1974 ou en 1977. Nous allons nous assurer d’avoir les outils scientifiques et administratifs pour appliquer la loi et pour s’assurer de la viabilité, à long terme, de l’industrie des pêches, qui est tellement importante pour les Canadiens partout au pays.»
M. LeBlanc a rappelé que la Loi sur les pêches avait été la première loi environnementale à avoir été adoptée après la naissance de la Confédération canadienne. En 1977, cette loi avait fait l’objet de plusieurs changements, notamment l’élargissement de la zone économique de pêche, qui était passée de 12 milles à 200 milles marins.
«Nous croyons que c’était le temps de donner des protections modernes basées sur la science, a soutenu le ministre. Quand je regarde les avis scientifiques que je reçois pour établir le contingent de certains stocks de poisson ou pour émettre d’autres permis de pêche, ce ne sont pas les mêmes avis que recevait le grand-père du premier ministre Justin Trudeau, qui était ministre des Pêches dans les années 50 avec le gouvernement de Louis St-Laurent!»
SCÈNE FÉDÉRALE – page 14 – Volume 31,1 – Février-Mars 2018