Les débarquements québécois de crabe des neiges ont fléchi en 2024 par rapport à ceux de 2023, atteignant 13 375 tonnes métriques au lieu de 15 205, une baisse appréciable de 12 %. Par contre, les revenus ont augmenté de 77 millions à 99 millions de dollars. Ils avaient atteint 194 millions de dollars en 2022.
Il s’agit dans le cas des revenus d’un gain de 28,6 %, attribuable à une assez forte augmentation du prix versé aux crabiers, toutes proportions gardées, précise l’économiste Simon Desrochers, du ministère fédéral des Pêches et des Océans.
«La valeur de 99 millions (M$) est sous la moyenne de 144 M$, qui a été la moyenne des 10 dernières années, mais il y a eu une nette amélioration du prix. Le prix a atteint 3,46 $ la livre, quand on fait la moyenne des zones de pêche. C’est un gain de 50 % par rapport au prix de 2023», note M. Desrochers.
L’année 2023, rappelle-t-il, avait été marquée par une retentissante chute du prix payé aux pêcheurs, de 6,53 $ la livre en 2022 à 2,33 $ en 2023, le résultat de stocks invendus, les consommateurs statuant qu’ils payaient le crabe trop cher. Ce prix avait atteint 7,62 $ en 2021, en pleine pandémie, alors que les liquidités atteignaient des seuils records. Ce prix de 2,33 $ la livre en 2023 était le plus faible de la décennie.
Pour la première fois en 2024, la part des captures de crabe des neiges, 35 %, sur l’ensemble des prises québécoises débarquées, a été inférieure à celle du homard, à 38 %.
Du côté des revenus, le crabe des neiges s’est retrouvé pour une cinquième année de suite en deuxième position derrière le homard. Comme en 2023, la proportion des revenus de pêches québécoises découlant des prises de crabe des neiges s’établit à une fraction de celle du homard, 64 % pour ce dernier, comparativement à 27 % pour le crabe, qui dominait depuis des décennies avant 2020. Ces proportions sont basées sur des données encore préliminaires, souligne Simon Desrochers.
Par secteur de capture, c’est, comme toujours, la zone 12 qui a dominé en matière de revenus, grâce à une valeur de débarquements de 43,7 M$, comparativement à 22,9 M$ dans la zone 16 et 12,9 M$ dans la zone 17. Dans la zone 12F, la valeur des captures s’est établie à 6,5 M$, comparativement à 3,1 M$ dans la zone 15 et 3 M$ dans la zone 14. Dans la zone 16A, les prises ont rapporté 2,8 M$ aux pêcheurs, comparativement à 1,4 M$ pour les crabiers de la zone 13 et 1 M$ pour ceux de la zone 12C.
Les débarquements dans les trois principales zones de captures de crabe des neiges ont atteint 6 136 tonnes dans la zone 12, du sud du golfe du Saint-Laurent, 3 052 tonnes dans la zone 16, essentiellement fréquentée par des crabiers de la Côte-Nord, et 1 671 tonnes dans la zone 17, qui couvre le secteur de Trois-Pistoles, au Bas-Saint-Laurent, à La Martre en Gaspésie, et une partie adjacente de la Côte-Nord.
Résultats par région maritime
C’est sur la Côte-Nord que le redressement de situation en matière de revenus a été le plus déterminant en 2024, en vertu de recettes de 37 M$, comparativement à 21 M$ en 2023. C’est un gain de 43,2 %.
«Dans les zones 13, 14 et 15 où pêchent les crabiers de la Côte-Nord, les quotas ont augmenté», précise Simon Desrochers, tout en ajoutant que le prix a aussi grimpé considérablement.
Un regard sur les captures appuie cette réalité, puisque les prises réalisées par les crabiers nord-côtiers sont passées de 4 172 à 4 941 tonnes métriques de 2023 à 2024, un gain de 18,4 %.
Aux Îles-de-la-Madeleine, la valeur des prises a fait un saut de 25 %, de 12 M$ à 15 M$, une hausse essentiellement attribuable à la progression du prix du crabe des neiges, assure Simon Desrochers, en raison de la baisse de contingent dans la zone 12, où pêchent essentiellement les Madelinots. Dans l’archipel, les prises ont fléchi de 2 235 à 1 880 tonnes métriques entre 2023 et 2024, une baisse de 15,9 %.
C’est en Gaspésie que la situation du crabe des neiges a le moins progressé en 2024 comparativement à l’année précédente puisque les revenus n’ont augmenté que 6,8 %, en vertu d’une hausse de 44 M$ à 47 M$.
Cette situation est essentiellement expliquée par la baisse importante des captures par les crabiers de la péninsule, 8 799 à 6 554 tonnes métriques, un fléchissement de 2 245 tonnes, ou 25,5 %.
«C’était à prévoir puisqu’il y a eu une baisse de quota dans la zone 12 et dans d’autres zones où les crabiers gaspésiens pêchent», rappelle Simon Desrochers.
Le crabe des neiges est de loin le crustacé parmi les espèces du peloton de tête québécois connaissant les plus grandes fluctuations de prix d’une année à l’autre, ou en considérant une période relativement courte.
Si on regarde la dernière décennie, le prix a un peu plus que doublé entre 2015 et 2028, en vertu d’un bond de 2,64 $ la livre en 2015 à 5,35 $ en 2018. La situation s’est répétée entre 2020, alors que le prix se situait à 3,78 $ la livre, et l’année suivante, à 7,62 $.
À la baisse, le contexte de 2022 et 2023 a généré une chute de 6,53 $ à 2,33 $ la livre, soit un fléchissement de 64,3 %. Si on allonge cette période aux deux ans séparant 2021 et 2023, la dégringolade a atteint 69,4 %, puisque le prix se situait à 7,62 $ la livre en 2021.
En 2023, Simon Desrochers avait expliqué cette situation en partie du fait que les Américains, de loin les plus grands acheteurs de crabe des neiges canadiens, vont exprimer leur nationalisme en se rabattant sur le homard du Maine, quand le prix du crabe est trop élevé, et dans un contexte inflationniste comme celui vécu en Amérique du Nord entre 2021 et 2024.
Les approvisionnements de crabe des neiges sont également plus variés géographiquement que ceux du homard, exclusif à l’est de l’Amérique du Nord. Les conditions du marché mondial de crabe des neiges dépendent donc aussi de la pêche en Alaska et au nord de la Russie.
ÉCONOMIE – page 13 – Volume 37,5 Décembre 2024 – Janvier 2025