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Pêche au homard : à deux doigts du record de la valeur globale des captures de 2015

Les homardiers québécois sont venus près d’égaler leur record de 2015 quant à la valeur globale de leurs prises, en 2016. Les captures ont atteint 73 millions $, comparativement à 73,8 millions $ l’année précédente. C’est une légère baisse de 1,1%. Ces deux totaux constituent un record de tous les temps au Québec.

Ces résultats, encore préliminaires, découlent principalement d’une solide hausse du prix moyen de la livre, qui est passé de 5,68 $ à 6,53 $, une augmentation de 14,9%. Cette hausse a presque contre-balancé à elle seule une diminution des prises québécoises de 5 890 à 5 068 tonnes métriques, une baisse significative de 14%.

Ce sont les Îles-de-la-Madeleine qui ont écopé de la plus forte baisse de prises. Ces captures sont passées de 3 486 tonnes métriques en 2015, ce qui constituait un record absolu, à 2 558 tonnes métriques cette année. C’est une chute de 26,6%. La hausse de prix de 13,5%, de 5,80 $ à 6,58 $ la livre, a permis d’atténuer la chute des revenus totaux pour les 325 homardiers de l’archipel. Ces revenus se sont établi à 37 117 803 $, en chute de 16,7% en comparaison aux     44 569 547 $ de 2015, un record.

Les homardiers évoluant à l’île d’Anticosti ont aussi connu une baisse des captures, mais plus limitée, de 9,8%, soit   de 504 à 454 tonnes métriques. Parce que ce fléchissement a été modéré, et parce que le prix a augmenté de 5,63 $ à 6,69 $ la livre, un bond de 18,8%, les revenus totaux des pêcheurs d’Anticosti ont augmenté de 7,1%, de 6 253 237 $ à 6 696 915 $. Ce sont des revenus records.

La Gaspésie a une fois de plus établi des marques historiques, en vertu de débarquements de 1 926 tonnes métriques, 6% de plus que le record précédent de 1 818 tonnes en 2015, et de revenus de 27 476 222 $, soit 24,4% de plus que les 22 081 525 $ de 2015. Le prix, qui est passé de 5,51 $ en 2015 à 6,47 $ en 2016, en hausse de 17,4%, a largement contribué à l’atteinte du record de revenus.

«C’est un record de tous les temps, ce qui se passe en Gaspésie. Il n’y a que le prix qui n’a pas atteint le record, de   6,59 $ la livre, établi en 2007», précise l’économiste Ali Magassouba, du ministère fédéral des Pêches et des Océans (MPO).

La Côte-Nord aussi a établi des records, avec des prises de 129,8 tonnes métriques, comparativement à 82,6 tonnes en 2015, une augmentation de 57,1%. Le prix, en passant de 4,96 $ à 5,94 $ la livre, a permis aux revenus totaux de grimper de 88%, à 1 700 520 $, un second record.

AUGMENTATION SPECTACULAIRE DES CAPTURES

En faisant abstraction du cas des Îles-de-la-Madeleine en 2016, monsieur Magassouba précise que ce sont les prises de tout le Québec, et les prises de homard en Amérique du Nord, qui ont augmenté de façon saisissante depuis le début des années 2000.

«Entre 2003 et 2015, les prises au Québec sont passées de 3 100 à 5 900 tonnes métriques. C’est une hausse de 90%. En Amérique, les captures ont augmenté de 82 000 à 162 000 tonnes métriques. C’est une augmentation de 99%. Ça a doublé. On est dans la tendance, au Québec. La différence, c’est qu’ailleurs, ça a ralenti, la croissance depuis cinq ans, alors qu’au Québec, ça a accéléré. Il reste à savoir si ça va se maintenir», souligne monsieur Magassouba.

Il note que les 2 558 tonnes des Îles-de-la-Madeleine en 2016, bien qu’elles constituent une chute importante, se situent quand même dans la moyenne des 15 dernières années. Les trois autres secteurs de capture retiennent l’attention de l’économiste pour d’autres raisons.

«La part d’Anticosti, qui représentait 5% des prises du Québec, est maintenant rendue à 9%. Elle a presque doublé. La part de la Côte-Nord est passée de 1 à 2%. Entre 2015 et 2016, le saut est de plus 56% sur la Côte-Nord. Les revenus totaux étaient de 200 000 $ avant, dans cette région. Ils ont été de 1,7 million $ cette année. À Anticosti, c’était 900 000 $ par année il n’y a pas si longtemps, et on est à près de 6,7 millions $. En Gaspésie, on approche des deux millions de kilogrammes de prises en 2016, plus précisément 1 926 tonnes métriques, alors qu’en 2011, c’était 875 tonnes. On a plus que doublé en cinq ans», dit l’économiste.

Les biologistes attribuent ces hausses de débarquements à des changements propices à la croissance du homard, notamment un certain réchauffement de la température des eaux de l’est du Canada.

Aux Îles-de-la-Madeleine et en Gaspésie, les homardiers ont eux-mêmes implanté un train de mesures visant à favoriser le nombre de géniteurs, comme l’augmentation de la taille légale, il y a près de 20 ans, de même que la réduction de l’effort de capture.

Cette réduction a pris diverses formes, comme la diminution du nombre de casiers, du nombre de jours de pêche et, en Gaspésie, d’un programme de rachat de permis de pêche. Depuis quelques   années, les homardiers ont aussi établi une taille maximale du homard capturé, de façon à laisser les plus gros géniteurs à l’eau.

Les raisons expliquant la hausse de prix moyen de 14,9% versée aux homardiers québécois en 2016 découlent de quelques facteurs, selon Ali Magassouba.

«Les prix sur les marchés américains ont augmenté, en raison de la vigueur de l’économie nord-américaine, où la reprise est lente mais constante depuis la récession de 2008-2009. Ça se fait petit à petit», explique-t-il.

«Le prix a aussi été influencé par le taux de change, puisque le dollar canadien a continué de descendre par rapport au dollar américain. On vend beaucoup aux États-Unis. De plus, les Chinois achètent des usines en Nouvelle-Écosse. Ce homard ne se retrouve plus sur le marché habituel qui est celui de Boston. C’est le phénomène de l’offre et de la demande. Les hausses de quantités semblent se calmer. Même le Québec suit cette tendance, puisqu’il y a eu globalement une baisse des prises de 14%», ajoute monsieur Magassouba.

Il attache une pondération de 5% de la hausse de prix au taux de change, et une autre part de 5% vient de la vigueur du marché américain. «Les 5% qui restent viennent d’autres facteurs», note l’économiste.

La présence accrue des Chinois, comme le groupe Zhangzidao en Nouvelle-Écosse, constitue l’un de ces facteurs.

«La demande de homard en Chine, poussée par la classe moyenne grandissante et en recherche de «biens de luxe», se fait de plus en plus forte. La demande du homard du Canada et des États-Unis est poussée à la hausse grâce à un prix beaucoup plus avantageux que celui du homard australien», précise monsieur Magassouba.

Les exportations vers la Chine sont facilitées par l’utilisation de nouveaux conteneurs maritimes, qui réduisent le taux de mortalité, s’établissant entre 5% et 10%, découlant des conteneurs aériens.

PERSPECTIVES POUR 2017

Questionné au sujet des perspectives pour l’année 2017, Ali Magassouba reste prudent.

«On peut commencer à y penser. On ne prévoit pas une grosse augmentation d’activités dans les économies des pays de l’OCDE. Aux États-Unis et au Canada, on prévoit 2,2% de croissance et dans la zone euro, 1,7%. Ça reste une croissance modérée. Pour le taux de change, on n’a pas de signe que ça va aller dans un sens plus que dans l’autre. C’est la stabilité», note-t-il.

Quel pourrait être l’effet Donald Trump, qui a promis de déchirer l’Entente de libre-échange nord-américain (ALENA)?

«Si jamais il y a des pressions protectionnistes, ça pourrait affecter le dollar canadien à la baisse. S’il déchire l’ALENA, il reste l’entente Canada-États-Unis. S’il applique des tarifs aux produits de Chine et du Mexique, il est difficile de prédire quel impact cela pourrait avoir sur le Canada», signale monsieur Magassouba.

Le nouveau traité de libre-échange avec l’Union européenne (UE) est finalement signé, note-t-il enfin, et l’UE ne va pas bannir l’importation de homard comme il était question.

Présentement, il y un quota appliqué par l’UE pour le homard cuit et congelé (2 000 tonnes métriques) et pour le homard préparé et préservé (240 tonnes métriques). «Ces quotas vont vraisemblablement disparaître», conclut l’économiste.

ÉCONOMIE (homard) – pages 4-5 – Volume 29,6 – Décembre 2016 – Janvier 2017

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Gilles Gagné
Gilles Gagné, né à Matane, le 26 mars 1960. J'ai fait mes études universitaires à Ottawa où j'ai obtenu un baccalauréat avec spécialisation en économie et concentration en politique. À l'occasion d'une offre d'emploi d'été en 1983, j'ai travaillé pour Pêches et Océans Canada comme observateur sur deux bateaux basés à Newport, deux morutiers de 65 pieds. Le programme visait l'amélioration des conditions d'entreposage des produits marins dans les cales des bateaux et de leur traitement à l'usine. Cet emploi m'a ouvert des horizons qui me servent encore tous les jours aujourd'hui. En 1989, après avoir travaillé en tourisme et dans l'édition maritime à Québec, je suis revenu vivre en région côtière et rurale, d'abord comme journaliste à l'Acadie nouvelle à Campbellton. C'est à cet endroit que j'ai rédigé mes premiers textes pour Pêche Impact, à l'été 1992. Je connaissais déjà ce journal que je lisais depuis sa fondation. En octobre 1993, j'ai déménagé à Carleton, pour travailler à temps presque complet comme pigiste pour le Soleil. J'ai, du même coup, intensifié mes participations à Pêche Impact. Je travaille également en anglais, depuis près de 15 ans, pour l'hebdomadaire anglophone The Gaspé SPEC et je rédige l'éditorial du journal Graffici depuis 2007.
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